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Case report

Nécrose utérine suite à une combinaison de compressions utérines et de ligature vasculaire lors d´une hémorragie post-partum: à propos d´un cas

Nécrose utérine suite à une combinaison de compressions utérines et de ligature vasculaire lors d'une hémorragie post-partum: à propos d'un cas

Uterine necrosis following uterine compressions in combination with vascular ligation during postpartum hemorrhage: a case report

Kamal EL Moussaoui1,&, Najia Zraidi1, Aziz Baidada1, Aicha Kharbach1

 

1Département de Gynécologie Obstétrique, Maternité Souissi, Centre Hospitalier Universitaire Ibn Sina, Rabat, Maroc

 

 

&Auteur correspondant
Kamal EL Moussaoui, Département de Gynécologie Obstétrique, Maternité Souissi, Centre Hospitalier Universitaire Ibn Sina, Rabat, Maroc

 

 

Résumé

L'hémorragie de délivrance reste la première cause de mortalité maternel au Maroc, c´est une urgence obstétricale qui nécessite une prise en charge rapide, efficace et multidisciplinaire dans les cas d´hémorragie du post partum grave rebelle au traitement médical, les progrès de la radiologie interventionnelle et surtout des techniques chirurgicales ont fourni des alternatives sûres et efficaces à l'hystérectomie d´hémostase. On rapporte un cas de nécrose utérine suite a un traitement conservateur chirurgicale de l´hémorragie de délivrance a base d´une combinaison de technique de compression utérine type B-Lynch et triple ligature vasculaire de Tsirulnikov. La patiente a présenté un tableau de sepsis a J4 du post partum avec un état fébrile et des douleurs pelvienne et un syndrome inflammatoire biologique qui s´est aggravé 48heurs après par l´apparition de contracture abdominale. Au scanner abdomino- pelvien a montré des bulles de gaz dans le myomètre utérin évoquant une nécrose. Une laparotomie exploratoire a été réalisée, l'exploration a révélé une nécrose complète de l'utérus. Les techniques chirurgicales des sutures de compression utérine jouent un rôle majeur dans l'arsenal thérapeutique de l'hémorragie post-partum pendant la césarienne. Elle permet, en complément ou en alternative à la ligature vasculaire, la préservation de la fertilité de la patiente mais elle nécessite également une prudence et une surveillance maximales des complications dont la plus grave est la nécrose utérine.


Delivery hemorrhage is the leading cause of maternal mortality in Morocco. It is an obstetric emergency requiring early, effective and multidisciplinary management in patients with severe postpartum bleeding resistant to medical treatment. Advances in interventional radiology and especially, in surgical techniques have provided safe and effective alternatives to hemostasis hysterectomy . We here report a case of uterine necrosis following conservative surgical treatment of delivery hemorrhage based on B-Lynch uterine compression suture combined with Tsirulnikov triple vascular ligation. The patient had sepsis on day 4 after delivery associated with fever and pelvic pain and biological inflammatory syndrome which worsened 48 hours after the onset of abdominal contracture. Abdomopelvic scanner, showed gas bubbles in the uterine myometer suggestive of necrosis. Exploratory laparotomy was performed, which objectified complete necrosis of the uterus. Uterine compression sutures are surgical techniques which play a major role in the therapeutic armamentarium of postpartum hemorrhage during cesarean section. It allows, in addition to or as an alternative to vascular ligation, the preservation of patient’s fertility, but it also requires maximum caution and monitoring of complications, the most serious of which is uterine necrosis

Key words: Delivery hemorrhage, uterine atonia, uterine capitonation, uterine necrosis, case report

 

 

Introduction    Down

L´hémorragie de délivrance reste la première cause de mortalité maternel au Maroc [1]. C´est une urgence obstétricale qui nécessite une prise en charge rapide, efficace et multidisciplinaire. Dans les cas d´hémorragie du post partum grave rebelle au traitement médical. Les progrès de la radiologie interventionnelle et surtout des techniques chirurgicales ont fourni des alternatives sûres et efficaces à l'hystérectomie d´hémostase. Au cours des dix dernières années, les techniques de compression utérine ont été décrites et intégrées dans l'arsenal thérapeutique contre les hémorragies post-partum. Cependant, leur évaluation dans la littérature est encore faible. Nous rapportons un cas rare de nécrose utérine suite à une combinaison de sutures de compression utérine et de ligature vasculaire.

 

 

Patient et observation Up    Down

Il s´agit d´une patiente âgée de 37 ans, sans antécédent pathologique notable. Quatrième geste 4ème part, les trois anciens accouchements étaient par vois basse. L´actuelle grossesse s´est déroulée sans anomalie. La patiente se présente à la maternité a 39 semaines d´aménorrhée +4 jours en début de travail, l´évolution du travail a été harmonieuse jusqu´à une dilatation du col utérin de 5 cm ou elle a présenté une souffrance fœtale aigue avec une bradycardie sévère objectivée à l´enregistrement du rythme cardiaque fœtale. Une césarienne a été indiquée en urgence, qui a permis l´extraction d´un nouveau-né de sexe masculin Apgar 10/10 ème, poids de naissanc: 3800 grammes. La patiente a présenté en per opératoire une hémorragie de délivrance sur inertie utérine. Le massage utérin complété par la perfusion d'ocytocine et l'admission de 5 comprimés en intra rectal de misoprostol (vu la non disponibilité de sulprostone) n'ont pas corrigé l'atonie utérine, et vue que la technique d´embolisation n´est pas accessible dans notre centre on a eu recours à la triple ligature de Tsirulnikov associé a la compression utérine en utilisant la technique B-Lynch en utilisant un fil résorbable Vicryl 1. Le saignement s´est arrêté et la patiente a bénéficiée d´une transfusion de 2 culots globulaires.

 

L´évolution en post opératoire était normal jusqu´au 4ème jours post opératoire ou la patiente a présenté une fièvre a (39,6°C) associée à une douleur abdominale et une sensibilité abdominale diffuse, les louchies n´était pas fétides et sans métrorragie. A L´hémogramme GB = 28,000/mm3, Hb = 10,1 g/dl et une CRP élevée à 283 mg/L. Une échographie pelvienne a été réalisé montrant une légère hématométrie associé avec un myomètre légèrement hétérogène surtout au niveau de la face antérieur de l´utérus. La patiente a été mise sous antibiotique à large spectre visant a traité une éventuelle endométrite. Quarante-huit heures après, l´évolution a été marquée par l´installation d´un état de choc septique avec une tachycardie a 130 battements par minute, une tension artérielle a 80/40 mmHg avec persistance d´une fièvre a (39,2°C) et cliniquement une contracture abdominale. Un scanner pelvien a été réalisé montrant un épanchement pelvien de moyen abondance et surtout des bulles de gaz au niveau du myomètre en faveur d´une nécrose utérine. Une laparotomie exploratrice a été indiqué en urgence.

 

L´exploration chirurgicale trouve nécrose utérine étendue surtout dans sa face antérieur, une hystérographie ouverte partiellement au centre et surinfectée avec la présence de fausses membranes occupant la totalité de la face antérieur de l´utérus (Figure 1). La nécrose a été définitive malgré l´ablation des fils de sutures de ligatures vasculaire antérieurement réalisée. Une hystérectomie totale a été réalisé (Figure 2) avec un lavage abandant au sérum de la cavité péritonéale avec mise en place de drain pelvien retirée deux jours après. L´évolution post opératoire a été favorable et l´examen anatomopathologiste a confirmé le diagnostic de nécrose utérine.

 

 

Discussion Up    Down

L'hémorragie du post partum est définie comme une perte de sang estimée supérieure à 500 ml dans les 24 h suivant l'accouchement vaginal et plus de 1000 ml après une césarienne [2]. L'hémorragie du post partum reste une urgence obstétricale qui nécessite une prise en charge rapide. Cette prise en charge se basant sur prise en charge médicale (ocytocine, méthyl-ergométrine, misoprostol), une prise en charge non médicale (massage utérin, compression utérine bimanuelle puis compression de l'aorte abdominale), réparation de lacérations vaginales ou cervicales et révision utérine manuelle le cas échéant [3].

 

En cas d'échec de ces mesures, et/ou si l'état de la patiente est instable, un traitement chirurgical s'impose, Il existe de nombreuses techniques chirurgicales pour la prise en charge de l´hémorragie du post-partum et l'hystérectomie reste la solution de référence dans ce contexte. Cependant, de nouvelles techniques chirurgicales conservatrices qui sont plus faciles à exécuter et sont moins agressifs ont émergé et sont devenant plus couramment utilisé [4].

 

La chirurgie de préservation de l'utérus a été définie comme toute chirurgie intervention consistant en une ligature des artères pelviennes ou une application de sutures de compression utérine pour obtenir une hémostase tout en conservant l'utérus, par ex. Ligature bilatérale de l'artère hypogastrique, ligature de l'artère utérine, suture de compression utérine B-Lynch, triple ligature de Tsirulnikov. La triple ligature de Tsirulnikov est une technique chirurgical simple conservatrice de l´utérus consistant une ligature bilatérale des ligaments ronds, utéroovarien ligaments et artères utérines [5]. La technique de B-Lynch: pratiquée pour la première fois en 1989 par Christopher B-Lynch chez une femme qui a refusé l'hémostase d'hystérectomie, pendant la césarienne, avec une résistance de suture résorbable 1 ou 2 et aussi longtemps que possible, qui est appliqué autour de l'utérus comme les sangles d'un sac à dos [6]: suture de Cho (sutures carrées): coréenne cette technique a été présenté par Cho JH qui consiste à appliquer ensemble les parois antérieure et postérieure de l'utérus par sutures multipoints avec cadre transfixantes; point Pereira souvent cité qui combine plusieurs sutures, verticales et transfixion sous séreuse horizontale [7].

 

Bien que ces techniques de compression et de ligature utérine ont été mal évaluées, la facilité de mise en œuvre a permis leur rapide diffusion dans le monde entier. En conséquence, certaines complications ont survenu: pyrométrie, érosion de la sangle à travers la paroi utérine, ischémie utérine, nécrose utérine, synéchie. Néanmoins la fréquence de telles complications reste incertaine compte tenu de l'absence de gros rapports dans la littérature concernant ces procédures, mais pourrait être de 5 à 7% [8].

 

La nature des fils utilisés (durée de résorption) et le degré de tension initial des points sont deux éléments pouvant expliquer la différence en termes d'ischémie. La technique en elle-même pourrait avoir un effet sur la survenue de la nécrose: une compression uniforme n'interrompant pas la vascularisation pariétale en totalité (notamment en évitant les sutures dans le sens horizontal et en les réalisant seulement dans les sens vertical) pourrait diminuer ce risque [9]. La mise en place correcte des points de compression (seule ou en association avec d'autres procédures hémostatiques) de telle sorte que la reperfusion du myomètre par le réseau anastomotique collatéral est préservée peut diminuer le risque de nécrose [10]. Enfin, la combinaison avec d'autres procédures hémostatiques entraînant une interruption totale du réseau anastomotique de l'utérus, comme ce fut le cas avec notre patiente [10].

 

Concernant l'association des techniques chirurgicales conservatrices, il reste peu à évaluer. La préférence est à la triple ligature distale type Tsirulnikov complété si nécessaire par un B-Lynch, modifié selon Hayman (utérus fermé) [11]. L'imagerie joue un rôle important dans le diagnostic. L´échographique est la première ligne car elle montre un grand utérus avec une paroi redessinée et une image hétérogène est associée à la présence d'air dans l'utérus. L'utilisation de la tomodensitométrie est également souvent utile, car dans notre cas, elle a révélé une nécrose utérine avec la présence de bulles de gaz dans le myomètre et dans l'endomètre et un manque de rehaussement du myomètre.

 

 

Conclusion Up    Down

Les techniques chirurgicales des sutures de compression utérine jouent un rôle majeur dans l'arsenal thérapeutique de l'hémorragie post-partum pendant la césarienne. Elle permet, en complément ou en alternative à la ligature vasculaire, la préservation de la fertilité de la patiente mais elle nécessite également une prudence et une surveillance maximales des complications dont la plus grave est la nécrose utérine. A suspecter devant tout tableau associant les douleurs abdominales, la fièvre et le syndrome inflammatoire après la chirurgie.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêts.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Kamal El Moussaoui a participé à la prise en charge du patient, à la recherche bibliographique et a rédigé l'article; Najia Zraidi, Aziz Baidada et Aicha Kharbach ont participé à la prise en charge thérapeutique du patient. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Figures Up    Down

Figure 1: image per-opératoire montrant la face antérieure de l´utérus nécrosée et surinfectée

Figure 2: la pièce d´hystérectomie montrant l´importance de la nécrose et de la surinfection de l´utérus

 

 

Références Up    Down

  1. Alaoui Belghiti Z. L'hémorragie de la délivrance à propos de 170 cas. Editions universitaires. 2011:1-216.

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  9. Reyftmann L, Nguyen A, Ristic V, Rouleau C, Mazet N, Dechaud H. Nécrose pariétale uterine partielle après capitonnage hémostatique selon la technique de Cho au cours d'une hémorragie du post-partum. Gynécologie Obstétrique & Fertilité. 2009;37(6):579-582. PubMed | Google Scholar

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  11. Marpeau L, Sentilhes L. Capitonnages uterins pour hémorragie de la delivrance: techniques et devenir Extrait des Mises ajour en. Gynecol Obstet. 2008;411-419:TOME XXXII