Les ostéochondromes: aspects clinico-radiologiques, à propos de 12 cas
Moulay Youssef Alaoui Lamran, Mohammed El Idrissi, Meriem Boubbou, Abdelmajid El Mrini, Mustapha Maâroufi
Corresponding author: Alaoui Lamrani Moulay Youssef, Service de Radiologie CHU Hassan II Fès, Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fès, Maroc
Received: 25 Jan 2016 - Accepted: 02 Mar 2016 - Published: 16 Mar 2016
Domain: Clinical medicine
Keywords: Ostéochondrome, radiographie, TDM, IRM, chondrosarcome
©Moulay Youssef Alaoui Lamran et al. Pan African Medical Journal (ISSN: 1937-8688). This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution International 4.0 License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Cite this article: Moulay Youssef Alaoui Lamran et al. Les ostéochondromes: aspects clinico-radiologiques, à propos de 12 cas. Pan African Medical Journal. 2016;23:109. [doi: 10.11604/pamj.2016.23.109.8948]
Available online at: https://www.panafrican-med-journal.com//content/article/23/109/full
Les ostéochondromes: aspects clinico-radiologiques, à propos de 12 cas
Osteochondromas: clinical and radiological features, about 12 cases
Moulay Youssef Alaoui Lamrani1,&, Mohammed El Idrissi2, Meriem Boubbou1, Abdelmajid El Mrini2, Mustapha Maâroufi1
1Service de Radiologie CHU Hassan II Fès, Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fès, Maroc, 2Service de Traumatologie Orthopédique B4 CHU Hassan II Fès, Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fès, Maroc
&Auteur correspondant
Alaoui Lamrani Moulay Youssef, Service de Radiologie CHU Hassan II Fès, Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université Sidi Mohammed Ben Abdellah, Fès, Maroc
L’ostéochondrome est l’une des tumeurs osseuses bénignes les plus fréquentes des membres. A travers une série de 12 observations d’ostéochondromes, les auteurs ont prélevés leurs aspects clinico-radiologiques et proposent une revue de la littérature à propos de cette tumeur, en précisant ses aspects cliniques, radiologiques et ses formes compliquées.
English abstract
Osteochondroma is one of the most common benign bone tumors of the limbs. Through a serie of 12 osteochondromas, clinical and radiological findings were depicted. Through these results, clinical, radiological features and complicated forms are reviewed.
Key words: Osteochondroma, radiography, CT, MRI, chondrosarcoma
L’ostéochondrome (OC) encore appelé exostose ostéochondrale ou ostéochondrome correspond à un hamartome qui se développe pendant la croissance par une ossification enchondrale et est recouvert d’une coiffe cartilagineuse [1]. Il peut être solitaire dans la plupart des cas ou, rarement, multiple intégrant la maladie héréditaire exostosante. Sa fréquence est estimée à 40% parmi les tumeurs osseuses bénignes et entre 10 et 15% parmi les tumeurs osseuses primitives. Sa réelle fréquence est sous-estimée en raison des formes asymptomatiques découvertes sur des radiographies standards réalisées pour une autre indication et qui est estimée à 1 à 2% des patients [2,3]. L’âge de prédilection de cette lésion se réparti sur les trois premières décennies avec un pic à 20 ans. On note une légère prédominance masculine [3].
A travers une série de 53 tumeurs osseuses primitives, on a recensé 12 OCs. Les observations ont été colligées aux services de traumatologie et de radiologie du CHU Hassan II de Fès (MAROC), sur une période de 04 ans, allant de janvier 2005 à décembre 2008. Les caractéristiques cliniques et radiologiques de ces OCs ont été relevées.
Le diagnostic d’OC a été porté dans la majorité des cas au cours des trois premières décades, sans influence de sexe: 80% des cas avaient moins de 30 ans (Figure 1). Une tuméfaction dure a été le maître symptôme des 12 cas, les autres signes associés comprenaient la douleur, la gêne fonctionnelle et les signes inflammatoires (Figure 2). Il a été noté une nette prédilection pour le membre inférieur (66% près du genou). Deux cas ont intéressé la région sous-unguéale du gros orteil et un seul cas l’extrémité supérieure de l’humérus (Figure 3). Il a été noté un délai moyen entre la découverte et la consultation en chirurgie d’environ 5 ans, avec des extrêmes allant de 2 à 15 ans, montrant la croissance très lente de cette tumeur. La radiographie standard a objectivé une excroissance osseuse issue de la surface osseuse métaphysaire, et présentant une base d’implantation pédiculée chez 7 cas et sessile chez 5 patients (Figure 4). La TDM a été réalisée chez un seul patient vu le volume important de l’excroissance, et elle n’a pas montré de signes scanographiques de malignité (Figure 4). Le traitement a consisté en une exérèse dans la majorité des cas. La vérification anatomopathologique de la pièce opératoire a confirmé le diagnostic d’OC sans signe de malignité.
L’OC est souvent asymptomatique; les formes cliniquement parlantes peuvent être liées à sa fracture ou associées à une compression vasculo-nerveuse, à la formation d’un pseudo-anévrysme, d’une bursite ou d’une déformation orthopédique consécutive à une compression d’un os adjacent en croissance [1,3]. Des signes de compression médullaire peuvent être associés aux rarissimes localisations vertébrales à développement intra-canalaire [4]. Une douleur, une tuméfaction avec augmentation de volume chez un adulte doit faire soupçonner une dégénérescence en chondrosarcome [3]. Cette tumeur bénigne peut être sessile ou pédiculée, prenant naissance perpendiculairement à la métaphyse et se dirigeant vers la diaphyse de l’os porteur; la corticale et l’os spongieux de l'OC et de l'os adjacent sont en continuité. Sa coiffe cartilagineuse n’est visible en radiographie standard que lorsqu’elle est calcifiée [3]; elle n'augmente de volume que chez l'enfant. Classiquement, le diagnostic clinico-radiologique ne souffre d’incertitude, et le recours à l’imagerie en coupe est d’un apport décisif, lors de la suspicion d’une dégénérescence. Ainsi, la scanographie sera destinée essentiellement aux zones anatomiques complexes et n’est pratiquée que lorsqu’une suspicion de dégénérescence est présente. La réalisation de coupes fines avec des reformations bi et tridimensionnelles offre une analyse plus fines des éléments décrits dans la radiographie standard. L’OC, contrairement au chondrosarcome, présente une matrice plus dense en périphérie, ses calcifications sont bien organisées, sa coiffe cartilagineuse est fine (moyenne de 6 à 8 mm) et peu atteindre 15 mm en croissance [3]. Une augmentation en taille de l’OC, une épaisseur de la coiffe cartilagineuse excédant 20 mm après la fin de croissance suggère une transformation maligne [5]. En IRM, l’OC non dégénéré présente une continuité de la corticale (bas signal) et de la cavité médullaire (signal graisseux) avec celles de l'os porteur ; sa coiffe cartilagineuse est très bien visible (hyposignal en séquence T1 et hypersignal intense en T2), et ne dépasse pas 15 mm; et il n'existe pas de modification après injection de Gadolinium. La transformation en chondrosarcome est rarissime pour la forme solitaire qui s’associe à un risque de 1 à 2% de dégénérescence [3], et n’intéresse presque que les OCs sur os mature. Les facteurs associés à un risque de dégénérescence maligne sont représentés essentiellement par la grande taille de l’OC, les localisations anatomiques atypiques sur les ceintures pelvienne et scapulaire et les formes associées à une maladie exostosante. Les formes dégénérées se transforment généralement en chondrosarcomes de bas grade, ces derniers peuvent se dédifférencier en haut grade si elles demeurent méconnues [1]. L’abstention thérapeutique est la règle dans l’exostose asymptomatique typique; la moindre suspicion de transformation maligne doit conduire à la biopsie chirurgicale. A l’opposée, les formes symptomatiques, les formes à croissance rapide, ou celles associées à un risque de déformation de membre doivent bénéficier d’une exérèse.
L’oc est une lésion hamartomateuse osseuse bénigne de diagnostic radio-clinique facile. L’abstention thérapeutique est de règle dans la forme asymptomatique, à l’inverse, les formes atypiques doivent bénéficier d’une étude anatomopathologique de la pièce d’exérèse qui s’avère nécessaire vu le risque, certes très faible, mais réel d’une transformation sarcomateuse.
Etat des connaissance sur le sujet
- L’ostéochondrome est l’une des tumeurs bénignes les plus fréquentes.
- Le diagnostic radiologique ne souffre de difficultés.
- La modification des signes cliniques et l’apparition de signes radiologiques d’agressivité peuvent prédire un risque de transformation sarcomateuse.
Contribution de notre étude a la connaissance
- Confirmation de l’épidémiologie de cette tumeur bénigne sur une cohorte comportant tumeurs bénignes et malignes.
- Démonstration clinique et radiologique des différents aspects de l’ostéochondrome dans différentes localisations.
- Rappel sur les formes symptomatiques et les signes radiologiques de transformation sarcomateuse.
Les auteurs ne déclarent aucun conflit d’intérêts.
Alaoui Lamrani M. Y. et El Idrissi M. ont participé à la conception de l’article, à la collecte des données et à la rédaction du manuscrit. Boubbou M., El Mrini A, et Maâroufi M. ont participé à la préparation du manuscrit final.
Figure 1: histogramme représentant le nombre de patients par tranches d’âge
Figure 2: graphique résumant les symptômes cliniques des OCs
Figure 3: graphique illustrant les os intéressés par ordre de fréquence
Figure 4: différents aspects radiologiques d’OCs. (a) OCs sessile, et pédiculé. (b) de la métaphyse fémorale distale. (c) double OCs pédiculés naissant de la face interne de l’extrémité humérale supérieure et se dirigeant vers la diaphyse de l’os porteur. (d) OC sous-unguéal du gros orteil. (e) radiographie du genou en incidence de profil montrant un OC pédiculé de la face postérieure de l’extrémité supérieure du tibia avec une coupe scanographique à l’étage de l’exostose montrant la continuité des corticales et la médullaire entre l’os parent et l’exostose, sans rupture corticale ou calcifications au voisinage
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