Home | Volume 21 | Article number 315

Original article

Kyste synovial intraosseux du scaphoïde carpien bilatéral révélé par une fracture pathologique: à propos d’un cas et revu de la littérature

Kyste synovial intraosseux du scaphoïde carpien bilatéral révélé par une fracture pathologique: à propos d’un cas et revu de la littérature

 

Merouane Abouchane1,&, Amine Belmoubarik1, Hamza Benameur1, Mohammed Nechad1

 

1Service de Chirurgie Traumatologique et Orthopédique Aile 4, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc

 

 

&Auteur correspondant
Merouane Abouchane, Service de Chirurgie Traumatologique et Orthopédique Aile 4, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc

 

 

Résumé

Nous rapportons l'observation d'un jeune patient qui présente un kyste synovial intraosseux (KSIO) du scaphoïde révélé par une fracture pathologique. Le kyste synovial intraosseux du scaphoïde constitue une étiologie très rare des douleurs du poignet encore plus des fractures et la forme bilatérale associe à une fracture demeure une entité exceptionnelle, non décrite dans la littérature.

 

 

Introduction

Le KSIO est une rare source de douleur au niveau du carpe, et a été décrit au niveau du scaphoïde [1], semi lunaire [2], le capitatum [3], le triquetrum [4], l'hamatum et le pisiforme [5,6]. La forme bilatérale au niveau du carpe été exceptionnellement décrite, encore plus au niveau scaphoïde [1,7] par contre aucun cas n'a été rapporté associant une fracture pathologique.

 

 

Patient et observation

Nous rapportons le cas de Mr. M.E jeune patient de 29 ans, serveur dans un café, sans antécédent particulier, qui a présenté suite à une chute de sa moto avec réception sur la paume de la main gauche (non dominante) traumatisme fermé du poignet et de la main gauche. A l'examen clinique, retrouve douleur du poignet, œdème de la tabatière anatomique et douleur provoquée à la traction du premier rayon, associé à une douleur à la palpation de la face dorsale de la main gauche. Toutefois, il nous signalait qu'il avait ressenti avant son traumatisme et en l'absence d'antécédent traumatique des douleurs occasionnelles d'effort du poignet gauche comme au poignet droit, ce qui nous a alertés a demandé la radio du poignet droit.

 

La radiographie standard:

 

Du poignet gauche (face et profil) révèle une image lacunaire polycyclique bien limité sans caractère agressif, localisée au niveau de la partie moyenne du scaphoïde (col), bien délimitée ne soufflant pas l'os, interrompue par une rupture corticale (fracture). La fracture n'était pas déplacée, associée à des fractures spiroides des 2°, 3° et 4ème métacarpiens ipsilaterale (Figure 1). Du poignet droit révèle une géode excentrée en externe en regard du tubercule du scaphoïde soufflant légèrement la corticale externe sans signe d'arthrose péri-scaphoïdienne ni de communication apparente avec les articulations contigus (Figure 2). Le patient a été opéré 4 jours après sa consultation pour les deux poignets après avoir pris son consentement pour aborder le poignet droit. A gauche: Une seule voie d'abord dorsale était nécessaire, avait révélé une fracture corporéale du scaphoïde avec une tumeur de contenu mucoïde jaunâtre. Nous avions réalisé un évidement avec comblement par de l'os spongieux prélevé de l'extrémité distale du radius. L'ostéosynthèse de la fracture du scaphoïde était réalisée par vissage de Herbert, les fractures des métacarpiens étaient ostéosynthèsèes par double embrochage transversale à l'aide de broches de Kirchner 14/10 (Figure 3). Une manchette plâtrée prenant la colonne du pouce en opposition jusqu'à la consolidation qui a été obtenue 45 jours après l'intervention, aux termes desquels les deux broches ont été retirées. Les soins postopératoires ont ensuite comporté une rééducation fonctionnelle de 1 mois et demie. Les suites opératoires ont été simples. A droite: une voie palmaire a été pratique retrouvant une géode intrascaphoïdienne bordée par une mince membrane fibreuse et contenant un liquide mucoïde jaunâtre (Figure 4) la cavité est curetée et comblée de greffons spongieux prélevé au niveau de la métaphyse radiale distale ipsilaterale (Figure 5). L'examen histologique conforme le diagnostic de kyste synovial intraosseux. L'examen bactériologique été négatif. Au dernier recul à une année et demie après le traitement, le patient a récupéré une bonne fonction du poignet avec indolence et reprise de ses activités de loisir et professionnelle.

 

 

Discussion

Le KSIO du carpe est beaucoup moins fréquent que celui des os longs, qui se localise essentiellement en sous chondral et en juxtaprticulaire [1]. Quatre des 88 patients présentant un KSIO rapportes par Schajowics et al [1] avaient des localisations bilatérales, une fois au niveau du semi lunaire et une fois au niveau du scaphoïde, Samuel et al rapportent un cas de localisation bilatérale au niveau du scaphoïde [1], Kligman lui décrit un cas original avec localisation simultanée bilatérale au niveau du semi lunaire et le scaphoïde [8]. Mais a aucun cas n'a été rapporte décrivant une localisation bilatérale associée a une fracture pathologique. La plupart des KSIO se développent au moyen âge, avec une moyenne d'âge dans les deux plus grandes séries de 41 et 47 ans [1]. La physiopathogénie reste controversée. Schématiquement deux hypothèses principales s'affrontent. Certains auteurs pensent que le kyste osseux se forme par inclusion synoviale de dehors en dedans. D'autres envisagent une métaplasie synoviale débutant au sein même de l'os, éventuellement favorisée par des phénomènes microtraumatiques ou ischémiques locaux [8,9] La lésion peut être: asymptomatique et mise en évidence à l´occasion de radiographies standards [10]; douleurs habituellement modérées mais répondant souvent mal aux antalgiques. Ces douleurs pourraient être expliquées par l'hyperpression intra-osseuse secondaire au développement d'un processus pathologique dans une cavité restreinte inextensible [11]; tuméfaction du poignet suite a une rupture du KSIO et la diffusion de son continu en intra-articulaire [12]; fracture pathologique responsable d'une recrudescence des douleurs [1]. Jusqu'à aujourd'hui aucun cas de KSIO de scaphoïde bilatéral n'a été révélé par une fracture pathologique. La cause de cette localisation bilatérale reste incertaine [1], qui peut être en relation avec une variante anatomique bilatérale possiblement en rapport avec une insertion défectueuse du ligament radioscapholunaire favorisant une collection du liquide articulaire lors de sa course anatomique [1] Devant une symptomatologie invalidante et réfractaire, l'indication chirurgicale semble s´imposer [10]. Ce n'est que devant une symptomatologie invalidante et réfractaire pendant une durée d'au moins de six mois [13] ou l'apparition de signes radiologiques d'évolutivité que l'indication chirurgicale sera posée [11, 13,14]. L'intervention consiste en une exérèse chirurgicale, avec une greffe osseuse spongieuse autologue et un moyen de synthèse si cela est nécessaire [15]. La greffe osseuse vascularisée aux dépens de l'artère transverse antérieure du carpe se déroulant sur le même site, constitue une autre alternative chirurgicale [12]. Le pronostic fonctionnel est généralement bon, et la récidive est exceptionnelle [12].

 

 

Conclusion

Le kyste synovial intraosseux du scaphoïde bilatérale est une lésion géodique bénigne rare. Elle peut être découverte, par hasard ou rarement, par des douleurs du poignet, exceptionnellement par une fracture comme c'est le cas de notre observation. Nous attirons l'attention sur l'intérêt de l'interrogatoire, l'examen clinique et la radiologie comparative.

 

 

Conflits d’intérêts

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêt.

 

 

Contributions des auteurs

Tous les auteurs ont contribué à la conduite de ce travail. Tous les auteurs déclarent également avoir lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Figures

Figure 1: fracture pathologique du scaphoïde gauche sur KSIO avec fracture du 2e, 3e et 4e métacarpien

Figure 2: KSIO du scaphoïde droit

Figure 3: radio de contrôle: vissage scaphoïdien et brochage transversal des métacarpiens

Figure 4: radio post opératoire après curetage et comblement

Figure 5: contenu mucoïde jaunâtre

 

 

Références

  1. Logan SE, Gilula LA, Kyriakos M. Bilateral scaphoid ganglion cysts in an adolescent. J Hand Surg Am. 1992 May; 17(3):490-5. PubMed | Google Scholar

  2. Jonsson K, Eiken O. Development of carpal bone cysts as revealed by radiography. Acta Radiol Diagn (Stockh). 1983; 24(3):231-3. PubMed | Google Scholar

  3. Flynn M, Light TR. A hole in (B) one. Orthopedics. 1986 Feb; 9(2):289-91. PubMed | Google Scholar

  4. Kambolis C, Bullough PG, Jaffe HI.Ganglionic cystic defects of bone. J Bone Joint Surg Am. 1973 Apr; 55(3):496-505. PubMed | Google Scholar

  5. Helal B, Vernon-Roberts B. Intraosseous ganglion of the pisiform bone. Hand. 1976 Jun; 8(2):150-4. PubMed | Google Scholar

  6. Mestdagh H, Butruille Y, Maynou C, Delobelle JM, Lecomte-Houcke M. An intra-osseous synovial cyst of the carpal bones: a propos of 3 cases. Ann Chir Main Memb Super. 1993; 12(4):275-80. PubMed | Google Scholar

  7. Kligman M, Roffman M. Bilateral intraosseous ganglia of the scaphoid and lunate bones. J Hand Surg Br. 1997 Dec; 22(6):820-1. PubMed | Google Scholar

  8. Masmejean E, Chantelot C, Alnot J, Hayem G. Primary carpal bone defect. Rev Chir Orthop Reparatrice Appar Mot. 2000 Feb; 86(1):80-6. PubMed | Google Scholar

  9. Yakoubi M, Meziani N, Yahia Cherif M, Zemmouri A, Benbakouche R. Pathological fracture of the carpal scaphoid (intra-osseous synovial cyst) Clinical and therapeutic aspect: case report. Chir Main. 2009 Feb; 28(1):37-41. PubMed | Google Scholar

  10. Chantelot C, Laffargue P, Masmejean E, Peltier B, Barouk P, Fontaine C. Fracture of the scaphoid carpal bone secondary to an intraosseous cyst: apropos of a case. Chir Main. 1998; 17(3):255-8. PubMed | Google Scholar

  11. Mnif H, Koubaa M, Zrig M, Jawahdou R, Sahnoun N, Abid A. Kyste synovial du scaphoïde carpien: à propos d'un cas et revue de la littérature. Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique. 2010; 96(2): 225-229. PubMed | Google Scholar

  12. Logan SE, Gilula LA, Kyriakos M. Bilateral scaphoid ganglion cysts in an adolescent. J Hand Surg Am. 1992 May; 17(3):490-5. PubMed | Google Scholar

  13. Schacherer TG, Aulicino PL. Intraosseous ganglia of the carpal bones. Orthop Rev. 1991 Oct;20(10):889-92. PubMed | Google Scholar

  14. Zouari M, Koubaa M, Boulila MH, Karray S, Litaiem T, Douik M. A rare diaphyseal bone tumor: degenerative mucoïde cyst. Rev Chir Orthop Reparatrice Appar Mot. 1997; 83(6): 574-7. PubMed | Google Scholar

  15. Calcagnotto G, Sokolow C, Saffar P. Intraosseus synovial cysts of the lunate bone: diagnostic problems. Chir Main. 2004 Feb;23(1):17-23. PubMed | Google Scholar