Volumineux corps étranger intra-rectal: à propos d’un cas
Khalid Mazine, Abdesslam Bouassria, Hicham Elbouhaddouti, Ouadii Mouaqit, Elbachir Benjelloun, Abdelmalek Ousadden, Khalid Mazaz, Khalid Ait Taleb
Corresponding author: Khalid Mazine, Service de Chirurgie Viscérale, CHU Hassan II – Fès, Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, Faculté de Médecine et de Pharmacie de Fès, Fès, Marco
Received: 20 Mar 2014 - Accepted: 01 Apr 2014 - Published: 04 Aug 2014
Domain: Clinical medicine
Keywords: Corps étranger, rectum, voie anale
©Khalid Mazine et al. Pan African Medical Journal (ISSN: 1937-8688). This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution International 4.0 License (https://creativecommons.org/licenses/by/4.0/), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.
Cite this article: Khalid Mazine et al. Volumineux corps étranger intra-rectal: à propos d’un cas. Pan African Medical Journal. 2014;18:273. [doi: 10.11604/pamj.2014.18.273.4226]
Available online at: https://www.panafrican-med-journal.com//content/article/18/273/full
Volumineux corps étranger intra-rectal: à propos d’un cas
Khalid Mazine1,&, Abdesslam Bouassria1, Hicham Elbouhaddouti1, Ouadii Mouaqit1, Elbachir Benjelloun1, Abdelmalek Ousadden1, Khalid Mazaz1, Khalid Ait Taleb1
1Service de Chirurgie Viscérale, CHU Hassan II – Fès, Université Sidi Mohamed Ben Abdellah, Faculté de Médecine et de Pharmacie de Fès, Fès, Maroc
&Auteur correspondant
Khalid Mazine, Service de Chirurgie Viscérale, CHU Hassan II – Fès, Université Sidi
Mohamed Ben Abdellah, Faculté de Médecine et de Pharmacie de Fès, Fès, Marco
L'insertion d'objets dans le rectum est peu courante dans les pays au contexte socio-culturel tels que le Maroc. Elle se caractérise par la gravité des complications éventuelles et les différentes possibilités thérapeutiques. Nous rapportons le cas d'un patient, ayant eu une incarcération d'un énorme objet introduit volontairement par voie anale, cet objet étant soigneusement façonné par le patient. Il a bénéficié d'une extraction manuelle. Cette dernière permet, quand elle est possible, d'éviter la chirurgie qui s'impose en cas d'échec ou de complications.
L'introduction de corps étrangers (CE) par l'anus est un phénomène bien décrit qui reste, au Maroc, une curiosité et un tabou. On ne peut donc pas estimer la fréquence de cette pathologie. Des objets peuvent être introduits dans le rectum à des fins thérapeutiques, sexuelles (érotisme anal ou agressions sexuelles), par trouble du comportement, pour dissimuler l'objet (drogues, etc) ou plus rarement, lors de circonstances accidentelles. Ces CE sont de nature très diverse et insolite (Bouteille, déodorant, magazine, etc).
Un patient de 49 ans sans antécédents notables, s'est présenté aux urgences pour une sub-occlusion en rapport avec un CE incarcéré en intra-rectal depuis son introduction cinq jours auparavant en vue de traiter une crise hémorroïdaire. L'examen trouvait un patient en bon état général, stable sur le plan hémodynamique, et apyrétique. L'examen abdominal était sans particularités, avec un abdomen souple et non distendu. Le toucher rectal percevait au bout du doigt l'extrémité distale de l'objet qui venait buter contre l'excavation sacrée. La radiographie de l'abdomen sans préparation permettait de visualiser le CE, volumineux et se projetant au niveau du pelvis (Figure 1). L'extraction par voie basse à l'aide d'une pince a été faite sous sédation, au bloc opératoire, en position de taille périnéale. Il s'agissait d'un objet volumineux et oblong, mesurant près de 15 cm, ayant été fabriqué par le patient à partir d'un tuyau d'arrosage soigneusement recouvert de plusieurs couches de plastique, et introduit volontairement (Figure 2, Figure 3). Le patient était gardé en observation après l'extraction. L'évolution était sans particularités, et la reprise d'un transit effectif en gaz et en selles s'est faite le lendemain de l'extraction. Le patient était déclaré sortant J+2.
Le rapport le plus ancien sur la prise en charge d'un corps étranger intra-rectal remonte au XVIème siècle [1]. On distingue l'incarcération de corps étrangers ingérés par voie buccale et les corps étrangers introduits par voie rectale pour diverses raisons. La cause la plus fréquente d'insertion de corps étranger est liée aux pratiques sexuelles, la plupart du temps solitaires. Les autres étiologies sont l'auto-thérapeutique (d'une constipation, d'hémorroïdes, ou de prurit anal), l'origine traumatique, les agressions, et l'origine psychiatrique [2]. Notre patient rapporte l'introduction du corps étranger dans un but d'auto-thérapeutique, même si l'hypothèse de pratique sexuelle solitaire ne peut être écartée. La présence de corps étranger intra-rectaux est très peu courante dans les pays en développement, et plus fréquente dans les pays industrialisés [3]. Les patients se présentent souvent aux urgences plusieurs heures ou plusieurs jours après l'insertion du corps étranger, avec un délai moyen de 1,9 jours [1]. Notre patient s'est présenté 5 jours après l'introduction du corps étranger. Les principaux motifs de consultation sont la rectorragie et la douleur abdominale aigüe ou persistante associée à un syndrome occlusif ou sub-occlusif. Les ténesmes ou les inconforts ano-rectaux sont souvent citées [4]. Un toucher rectal (mieux réalisé sous sédation), vérifie l'intégrité anorectale et peut retrouver le CE. Combiné à la palpation abdominale, il permet parfois d'estimer sa position [5]. Si l'objet est radio-opaque, le diagnostic est confirme à l'ASP qui visualise sa forme, sa taille et sa position. L'ASP peut aussi objectiver un pneumopéritoine, signe d'une perforation digestive, imposant la laparotomie en urgence. Les corps étrangers peuvent en effet être à l'origine d'érosions intestinales ou vasculaires, d'abcès, d'obstruction, et d'hémorragie [6]. Si le diagnostic est établi avant le stade de complication, l'extraction s'imposerait sauf que cette dernière pose aussi une problématique. Elle doit être réalisée par voie basse dans la mesure du possible. Une anesthésie locorégionale ou même générale au bloc opératoire s'impose pour un relâchement des sphincters anaux [7]. Des succès d'extraction par voie basse ont été rapportés mais concernent surtout les CE de petite taille [7]. Chez notre patient, malgré la taille considérable de l'objet, l'extraction par voie basse était réussie. Certains facteurs comme la taille, la forme et la migration des corps étranger peuvent rendre difficile la recherche et l'extraction par voie basse. En cas d'échec, une laparotomie s'avère nécessaire [8,9] pour repousser l'objet vers l'ampoule rectale sans ouvrir le colon. Néanmoins, pour les corps étrangers de grande taille, une colostomie peut s'avérer nécessaire. [10]. La mise en place d'une stomie d'amont dépend du traumatisme périnéal, de la chronicité de la situation, et de l'état de la paroi colorectale appréciée en per opératoire [11].
Les corps étrangers colorectaux introduits par voie anale sont des évènements qui restent peu fréquents dans notre contexte, mais les praticiens exerçant dans nos contrées peuvent y être confrontés. Cette observation en a illustré un cas montrant la possibilité de l'extraction par voie basse malgré la taille considérable du corps étranger. Si le diagnostic est relativement facile après un interrogatoire soigneux et un examen clinique rigoureux, une prise en charge rapide permet d'éviter de graves complications.
Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêt.
Khalid Mazine et Abdesslam Bouassria ont rédigé l'article. Tous les auteurs ont participé à la prise en charge et au suivi du patient et à la correction de l'article. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale de l'article.
Figure 1: Abdomen sans préparation montrant le corps étranger au niveau du pelvis
Figure 2: corps étranger après son extraction
Figure 3: corps étranger après son extraction
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