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Luxation obturatrice de la hanche: à propos d’un cas

Luxation obturatrice de la hanche: à propos d’un cas

 

Yaovi Yanick Dellanh1,&, Anani Abalo1, Kosivi Fortey1, Messanvi Yao Akpoto1, Kolima Akloa1, Yaovi Edem James1, Atchi Walla1, Batarabadja Bakriga1, Assang Dossim1

 

1Service de Traumatologie Orthopédie, Centre Hospitalier Universitaire Sylvanus Olympio de Lomé, Togo

 

 

&Auteur correspondant
Yaovi Yanick Dellanh, Service de Traumatologie Orthopédie, Centre Hospitalier Universitaire Sylvanus Olympio de Lomé, Togo

 

 

Résumé
La luxationde hanche dans sa variété obturatrice est rare. Nous rapportons un cas chez un sujet jeune de 30 ans. Le traitement orthopédique a donné de bon résultat. Le bilan radiographique à 20 mois post traumatique ne note pas de signe de nécrose aseptique de la tête fémorale.

 

 

Introduction

La luxation traumatique de hanche se définit par un déplacement permanent de la tête fémorale hors de la cavité acétabulaire à la suite d´un traumatisme violent survenant sur une hanche en attitude propice [1]. La variété obturatrice se caractérise par la position de la tête en avant du foramen obturé. Ellesurvient en général lors d'un mouvement de flexion abduction rotation externe forcée de la hanche [2]. C'est une urgence fonctionnelle dont la réduction orthopédique en première intention est formelle et ceci dans les meilleurs délais. Nous vous rapportons ici le cas d'un patient de 30 ans qui a présenté une luxation obturatrice pure de hanche et le résultat fonctionnel à 20 mois.

 

 

Patient et observation

Il s'est agi d'un patient de 30 ans, coiffeur autonome avant l'accident admis aux urgences chirurgicales du CHU Sylvanus Olympio de Lomé au décours d'un accident de la voie publique. Le patient motocycliste a été heurté par une voiture. Il a présenté une contusion thoracique associé à un traumatisme fermé de la hanche droite. L'examen local notaitune attitude vicieuse de la hanche droite en flexion abduction rotation externe (Figure 1) ; une dermabrasion à la face antéromédiale du genou homolatéral avec un tiroir postérieur. Il n'y avait pas complications vasculo-nerveuses associées. L'examen thoracique notait une respiration eupnéïque, une douleur exquise du tiers moyen de la clavicule gauche et à la pression des côtes antérieures sans signes d'épanchement liquidien ou gazeux pleural. La radiographie du bassin réalisée (Figure 2) a montré une luxation obturatrice de la hanche droite. La radiographie thoracique notait des fractures de côtes et une fracture de la clavicule gauche Une réduction sous anesthésie générale a été réalisée 04 h après le traumatisme. La radiographie de contrôle était satisfaisante et ne notait pas de fracture du col ni du cotyle (Figure 3), une TDM post-réductionnelle n'a pu être réalisée. Une traction transcondylienne a été mise en place pendant 03 semaines puis une marche sans appui pendant 03 semaines. L'appui a été autorisé au 45ème jour post-réductionnel. La TDM faite à 18 mois ne notait pas de signes d'ostéonécrose de la tête fémorale (Figure 4). Le recul après 20 mois note un score fonctionnel PMA à 18, sans raideur ni douleur de la hanche et sans signe radiologique d'ostéonécrose de la tête fémorale.

 

 

Discussion

La luxation obturatrice représente 6 à 10% de luxations rapportées dans la littérature [3]. La plupart des auteurs [1-5] s'accordent sur la violence des forces vulnérantes ; ce qui s'explique par le polytraumatisme chez notre patient. La luxation antérieure survient en flexion abduction - rotation externe lors d´un impact sur la face interne du genou, avec effet came du grand trochanter sur l´ilion en abduction maximale [2]. Nous avons retrouvé ce mécanisme: le patient en croupe sur une moto implique donc la hanche en flexion abduction ; la dermabrasion à la face antéro-médiale du genou homolatéral associée à un tiroir postérieur traduisant une rupture du ligament croisé postérieur confirme l'impact au genou. La réduction orthopédique s'impose en urgence [1,2,5,6]. Les difficultés réductionnelles liés à la masse musculaire, au risque d'enclavement de la tête fémorale dans le foramen obturé et de fracture iatrogène du col ont été rapportées [4]. Cette réduction doit se faire sous anesthésie générale avec relâchement musculaire complet. Les manœuvres de réduction diffèrent selon les auteurs Epstein [5] et Brav [6] recommandent une traction dans l´axe du fémur suivie d´une flexion progressive de la hanche en rotation interne et en abduction, tout en maintenant la traction. Toms et al [2] ont critiqué l´abduction dans la manoeuvre de réduction vu que la hanche est déjà en abduction forcée. Ils ont condamné également le mouvement en rotation interne forcée qui expliquerait la fracture du col fémoral décrit par certains [7,8]. Ils préconisent d´utiliser la table orthopédique et d´associer à la traction axiale, une traction latérale de la cuisse puis de relâcher progressivement la traction tout en imprégnant un mouvement d´adduction rotation interne. Dans notre cas les manœuvres ont consisté à une traction première dans l'axe du membre permettant une décoaptation suivie d'une flexion rotation interne: ce qui ramenait le membre en extension adduction et rotation interne puis nous avons procédé à la manœuvre de Boehler ; nous estimons cette technique plus appropriée vu le déplacement de la tête fémorale en cas de luxation obturatrice. La TDM post-réductionnelle doit systématiquement rechercherune lésion chondrale ou une fracture infraradiologique. Une fracture ostéochondrale de la tête fémorale s'associe fréquemment à cette variété de luxation [5,9, 10]. Richard et Howe [9] expliquent cette fracture par l'impaction de la tête fémorale sur la partie basse de la lame acétabulaire antérieure. Cette impaction peut provoquer également une fracture de la lame acétabulaire antérieure [11]. La TDM n'a pu être réalisé dans l'immédiat après réduction. Cette constatation nous conforte dans notre pratique quotidienne : la mise en traction systématique suivie d'un appui différé à partir du 45ème jour post-traumatique ; ceci d'autantplus que le bilan tomodensitométrique n'est pas toujours accessible aux patients dans nos conditions d'exercice. Le risque de nécrose avasculaire secondaire est accru avec le retard de réduction; Hougaard [12] a noté 52,9 % de nécrose quand le délai de réduction dépassait les 6 h. Notre réduction s'est faite dans un délai de 4h sans fracture iatrogène, ceci du fait d'un diagnostic précoce et d'une réduction atraumatique.

 

 

Conclusion

La luxation obturatrice de hanche est une variété rare des luxations régulières de hanche. La réduction orthopédique doit se faire en urgence ; le risque de fracture iatrogène du col n'étant pas négligeable.

 

 

Conflits d’intérêts

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d'intérêts.

 

 

Contributions des auteurs

Tous les auteurs ont contribué à la conduite de ce travail. Tous les auteurs déclarent également avoir lu et approuvé la version finale du manuscrit.

 

 

Figures

Figure 1: attitude vicieuse du membre pelvien droit en flexion abduction, rotation externe ; noter l’impact médial au genou (flèche rouge)

Figure 2: radiographie du bassin montrant la luxation obturatrice droite

Figure 3: radiographies du bassin avant et après réduction

Figure 4: TDM du bassin à 18 mois post-réductionnel : absence de signes de nécrose de la tête fémorale droite

 

 

Références

  1. Pietu G, Malissard M, Raynaud G, Letenneur J. Luxations traumatiques pures de hanche. Traité d'Appareil locomoteur. 1993; 14-077-A-10. PubMed | Google Scholar

  2. Toms AD, Williams S, White SH .Obturator dislocation of the hip. J Bone Joint Surg (Br). 2001; 83(1): 113-115. PubMed | Google Scholar

  3. Elouakili I, Ouchrif Y, Ouakrim R, Lamrani O, Kharmaz M, Ismael F, Lahlou A, El BardouniA,Mahfoud M, Berrada MS, El Yaacoubi M. Luxation obturatrice de la hanche: un traumatisme rare en pratique sportive. Pan AfricanMedical Journal. 201418 : 138. PubMed | Google Scholar

  4. Boyer P, Bassaine M, Huten D. La luxation obturatrice traumatique chez l'adulte : à propos d'un cas et revue de la littérature. Revue de chirurgie orthopédique. 2004; 90(7) : 673-677. PubMed | Google Scholar

  5. Epstein HC, Wiss DA .Traumatic anterior dislocation of the hip. Orthopedics. 1985 ; 8(1):130-132-134. PubMed | Google Scholar

  6. Brav EA. Traumatic anterior dislocation of the hip. J Bone Joint Surgery (Am). 1962; 44(A): 1115-1121. PubMed | Google Scholar

  7. Catonné Y, Meyer A, Sariali E, Biette G. Pathologie du complexe pelvi-fémoral du sportif. Pathologie du complexe pelvi-fémoral du sportif. 2009; 88-99. PubMed | Google Scholar

  8. Polesky RE, Polesky FA. Intrapelvic dislocation of the femoral head following anterior dislocation of the hip: a case report. J Bone Joint Surg (Am). 1972;54(5):1097-8. PubMed | Google Scholar

  9. Richards BS, Howe DJ. Anterior perineal dislocation of the hip with fracture of the femoral head: a case report. Clin Orthop. 1988;228: 194-201. PubMed | Google Scholar

  10. Badelon O, Leroux D, Huten D, Duparc J. Anterior luxation of the hip associated with a fracture of the anterior aspect of the acetabulum: Report of a case. AnnChir. 1986 ;40(1):38-40. PubMed | Google Scholar

  11. Bonnemaison MF, Henderson ED. Traumatic anterior dislocation of the hip with acute common femoral artery occlusion in a child. J Bone Joint Surg (Am). 1968; 50(4):753-6. PubMed | Google Scholar

  12. Hougaard K.Traumatic posterior dislocation of the hip: prognostic factors influencing the incidence of avascular necrosis of femoral head. Arch Orthop Trauma Surg. 1986; 106(1): 32-5. PubMed | Google Scholar